Cancer de l’estomac et du cardia

Dans le cas des cancers les plus fréquents de l’estomac (appelés adénocarcinomes de l’estomac ou adénocarcinomes gastriques), la tumeur se développe à partir de la muqueuse gastrique. 

Il existe plusieurs formes d’adénocarcinomes et on distingue les formes dites intestinales des formes diffuses. Pour les formes intestinales, une atrophie de la muqueuse précède l’apparition des cancers. La prolifération d’une bactérie dans l’estomac (helicobacter pylori) peut la favoriser. Cette atrophie rend la muqueuse plus sensible aux agents mutagènes : le cancer de l’estomac apparait progressivement après une étape de dysplasie (anomalie des cellules) légère puis sévère.

La présence de l’infection à Helicobacter pylori est nécessaire mais insuffisante au développement du cancer. D’autres facteurs, comme les facteurs alimentaires semblent favoriser la survenue du cancer gastrique chez les patients infectés. Certaines maladies rares de l’estomac, comme la maladie de Ménétrier (qui correspond à une prolifération exagérée de la muqueuse) ou la maladie de Biermer (qui s’accompagne d’une atrophie gastrique) sont également des maladies prédisposant aux adénocarcinomes de l’estomac.

6512
nouveaux cas par an
12
%
des cancers digestifs
65
%
concernent des hommes
Le cardia correspond à la zone anatomique située à la jonction entre l’œsophage et l’estomac.

On traite par exérèse totale de l’estomac élargie au cardia (oesogastrectomie totale) les tumeurs du cardia qui se développent dans la partie haute de l’estomac. Leur prise en charge est assez similaire à celle des cancers de l’estomac.

Les cellules tumorales se développent initialement dans la muqueuse de l’estomac mais ont aussi une propriété de déplacement autonome non contrôlé par l’organisme. En quittant le site initial de la tumeur, ces cellules vont former des métastases, soit en suivant la circulation de la lymphe, soit en passant dans le sang.

Contrairement aux tumeurs de l’estomac dont le nombre de nouveaux cas diminue chaque année, le nombre de cancers du cardia augmente, sans qu’on ne sache encore pourquoi, en dehors de leur fréquence plus grande chez les patients obèses et/ou les patients fumeurs.

Les cancers de l’estomac et du cardia sont rares avant l’âge de 50 ans.

Données : Santé Publique France – BEH décembre 2022, La Ligue contre le cancer

Quelle partie du corps est atteinte ?

L’estomac est un organe creux qui a la forme d’un réservoir. Il est situé dans la partie supérieure de l’abdomen, appelée région épigastrique. Il fait suite à l’œsophage avec lequel il communique par l’intermédiaire du cardia* et se poursuit par le duodénum auquel il est relié par le pylore. C’est un des organes principaux de la digestion. L’estomac reçoit les aliments provenant de l’œsophage. Il permet le malaxage des aliments et leur mélange avec les enzymes de la digestion. Les glandes de la muqueuse gastrique (ou revêtement de l’estomac) agissent sur la digestion en sécrétant des sucs : l’acide chlorhydrique et la pepsine. Les aliments, fragmentés sous l’effet des sucs gastriques, sont brassés et évacués vers le duodénum sous l’effet des contractions des muscles de la paroi gastrique. L’objectif de cette fragmentation des aliments est de les rendre accessibles à l’absorption, seconde étape de la digestion qui se fait au niveau de l’intestin grêle. L’absorption consiste au passage des aliments fragmentés du tube digestif vers le réseau sanguin.

La muqueuse gastrique est complexe, puisqu’elle est constituée de cellules muqueuses juxtaposées, reliées entre elles par des jonctions très serrées afin de la protéger de l’acidité gastrique. Cette muqueuse possède également des cellules sécrétant des hormones ou d’autres agents stimulant la fonction gastrique (pepsine, ions chlore…).

L’estomac produit également le « facteur intrinsèque », substance qui permet à la vitamine B12 d’être absorbée dans l’intestin (une carence en vitamine B12 est à l’origine d’une anémie).

Il est possible de vivre sans cardia ni estomac avec des risques de manque en vitamine B12 et en fer qu’il faut alors compenser et de troubles souvent mineurs de l’alimentation nécessitant des adaptations diététiques.

Qu’est-ce que le cancer de l’estomac ?

Chaque cellule de l’organisme peut subir des modifications de ses chromosomes au niveau de son acide désoxyribonucléique (ADN*) sous l’influence de facteurs appelés facteurs mutagènes. Certains facteurs mutagènes vont entraîner une perte de contrôle du programme de vie cellulaire, conduisant soit à une multiplication intempestive de la cellule, soit à son immortalisation, soit bien souvent à la combinaison de ces deux phénomènes. La multiplication non contrôlée de cellules associée à leur immortalisation constitue le point de départ de toute tumeur* maligne.

Dans le cas des cancers les plus fréquents de l’estomac (appelés adénocarcinomes* de l’estomac ou adénocarcinomes gastriques), la tumeur se développe à partir de la muqueuse gastrique. D’autres types, plus rares, de tumeurs gastriques existent : sarcome, tumeurs stromales, tumeurs endocrines, lymphomes. Ces autres tumeurs, malignes, se développent à partir d’autres cellules que celles de la muqueuse gastrique. Elles ne seront pas abordées dans cet ouvrage.

Il existe plusieurs formes d’adénocarcinomes et on distingue les formes dites intestinales des formes diffuses (selon la classification de Lauren). Pour les formes intestinales, l’apparition des cancers est précédée d’une atrophie de la muqueuse qui est favorisée par la prolifération d’une bactérie dans l’estomac (Helicobacter pylori). Cette atrophie rend la muqueuse plus sensible aux agents mutagènes : le cancer apparait progressivement après une étape de dysplasie (anomalie des cellules) légère puis sévère. La présence de l’infection à Helicobacter pylori est nécessaire mais insuffisante au développement du cancer. En effet, seulement une petite proportion des sujets infectés développe ce cancer (1% environ). D’autres facteurs, comme les facteurs alimentaires (abordés plus loin) semblent favoriser la survenue du cancer gastrique chez les patients infectés.

Certaines maladies rares de l’estomac, comme la maladie de Ménétrier (qui correspond à une prolifération exagérée de la muqueuse) ou la maladie de Biermer (qui s’accompagne d’une atrophie gastrique) sont également des maladies prédisposant aux adénocarcinomes* de l’estomac.

Les cellules tumorales* se développent initialement dans la muqueuse de l’estomac mais ont aussi une propriété de déplacement autonome non contrôlé par l’organisme. En quittant le site initial de la tumeur, ces cellules vont former ce qu’on appelle des métastases, soit en suivant la circulation de la lymphe*, soit en passant dans le sang. On peut donc avoir des métastases ganglionnaires (les cellules tumorales ont migré en suivant la lymphe), soit des métastases viscérales (comme dans le foie, les poumons ou les os, les cellules ayant dans ce cas migré par voie sanguine).

Quelle est la différence entre un cancer de l’estomac et un cancer du cardia ?

Le cardia est une zone anatomique située à la jonction entre l’œsophage et l’estomac.

Les tumeurs à ce niveau sont de 3 types et définis par la classification de Siewert. Pour les tumeurs de type II et III situées sur la partie haute de l’estomac, la prise en charge est similaire à celle des cancers de l’estomac. Pour les tumeurs de type I, la prise en charge se rapproche de celle des cancers de l’oesophage.

Contrairement aux tumeurs de l’estomac dont le nombre de nouveaux cas diminue chaque année, il existe une augmentation du nombre de cancers du cardia dont l’explication n’est pas clairement établie en dehors de leur fréquence plus grande chez les patients obèses et/ou les patients fumeurs. Les cancers du cardia semblent survenir chez des patients plus jeunes, ils sont généralement plus agressifs, avec en particulier un risque plus important de métastases* ganglionnaires.

Les cancers de l’estomac et du cardia sont-ils fréquents ?

En Europe, en 2020, il y a eu environ 136 000 nouveaux cas de cancers gastriques diagnostiqués : le cancer gastrique représente donc le 5ème cancer en fréquence et reste la 4ème cause de décès par cancer avec 97 000 décès par an.

En France, pour l’année 2023, le nombre estimé de nouveaux cas de cancer de l’estomac était de 6 515 dont 4 254 chez l’homme et 2 261 chez la femme1, et le nombre estimé de décès par cancer de l’estomac était de 4 300 dont 2 800 chez l’homme et de 1 500 chez la femme. On estime que les cancers de l’estomac représentent environ 3 % de l’ensemble des cancers et environ 12 % des cas de cancers digestifs.

Au niveau mondial, le cancer de l’estomac est aussi le 5ème cancer le plus fréquent, particulièrement présent dans les pays d’Asie et d’Amérique latine. Dans le contexte de flux migratoire actuel depuis les pays à risque élevé de ce cancer vers l’Europe, on peut s’attendre à une augmentation du nombre des nouveaux cas de cancers gastriques en Europe.

Le cancer gastrique survient plus fréquemment chez l’homme que chez la femme, avec un sex ratio de 2,6.

Le cancer de l’estomac est rare avant l’âge de 50 ans ; son risque augmente ensuite régulièrement avec l’âge. L’âge médian de survenue est de 71 ans pour les hommes et de 74 ans pour les femmes.

Au cours des 50 dernières années, la fréquence des cancers de l’estomac a diminué de façon importante : sur les 20 dernières années, le taux d’incidence a diminué de plus de 30 % et celui de mortalité de plus de 50 %.

C’est un cancer de pronostic intermédiaire dont le taux de mortalité a diminué de moitié sur les 30 dernières années.

En revanche, l’incidence du cancer du cardia augmente rapidement depuis les années 70 dans les pays occidentaux.

Dans le dernier article disponible sur le site de l’Institut national du cancer (INCa*) en 2023, les données sont fournies par organe (œsophage et estomac) sans plus de précision. Ces résultats ne permettent pas d’estimer l’évolution épidémiologique récente en France, concernant le cancer du cardia.

On peut estimer à environ 5 000 le nombre de nouveaux cas de cancer du cardia diagnostiqués chaque année en France. Le cancer du cardia survient généralement après 50 ans et touche beaucoup plus souvent les hommes que les femmes. Le pic d’incidence de la maladie se situe entre 55 et 65 ans.

Quels sont les principaux facteurs de risque ?

Plusieurs facteurs associés au risque de cancer de l’estomac ont été identifiés.

Des facteurs environnementaux et alimentaires comme un faible niveau socio-économique, un régime riche en sel ou en nitrates, une faible consommation de produits frais, une forte consommation de viande rouge, un tabagisme ou encore un surpoids ont été mis en évidence.

Certaines anomalies de la muqueuse gastrique comme la gastrite ou les ulcères en rapport avec une infection à Helicobacter pylori (HP) sont associées à une augmentation du risque de cancer de l’estomac dans leur forme intestinale.

Le risque est également augmenté en cas d’antécédent de chirurgie gastrique partielle, laissant en place une partie de l’estomac.

La diminution de l’incidence du cancer de l’estomac observée au cours des dernières décennies s’explique en grande partie par la diminution de la prévalence de l’infection à Helicobacter pylori (HP) et de son traitement ainsi que du changement d’habitudes alimentaires (conservation des aliments, augmentation de la consommation de fruits et légumes).

Concernant le cancer du cardia, l’infection à HP n’est pas considérée comme un facteur de risque, certaines études soulignant un effet plutôt protecteur de la bactérie. Un indice de masse corporelle élevé (supérieur à 25), la présence d’un reflux gastro-oesophagien et le tabagisme sont des facteurs de risque objectivés pour la survenue d’un cancer du cardia.

Existe-t-il des formes familiales de cancer de l’estomac ?

Oui. Certains cancers gastriques surviennent chez des personnes ayant une prédisposition génétique. Ces cas de cancer de l’estomac sont cependant très rares. Dans une très grande majorité des cas, les cancers de l’estomac sontsporadiques, c’est-à-dire sans facteur de prédisposition familiale évident.

Les principales formes de prédisposition génétique au cancer de l’estomac sont le syndrome de Lynch, le syndrome Peutz-Jeghers et les cancers gastriques diffus héréditaires liés à une mutation du gène d’une protéine appelée la E-cadhérine (Gène CDH1). Ces cancers de l’estomac surviennent dans un contexte très particulier, avec plusieurs cas de cancer dans une même famille et se déclarent chez des patients plus jeunes (moins de 60 ans).

Une prise en charge particulière est alors nécessaire, avec consultation d’oncogénétique afin de mettre en place une enquête, des tests génétiques (sur prise de sang) puis une surveillance adaptée pour le patient et ses apparentés* à risque élevé.

Peut-on éviter la survenue d’un cancer de l’estomac ou du cardia ?

Mises à part les quelques personnes ayant un risque très élevé en raison d’une prédisposition familiale, il n’est pas justifié de mettre en place un dépistage systématique du cancer de l’estomac ou du cardia dans la population générale. Ce n’est pas le cas dans les pays à forte prévalence comme le Japon. Ceci est dû à des modes de vie et des habitudes alimentaires différentes et la présence accrue d’infection à Helicobacter pylori (HP) constatée.

Il n’y a pas de mesure spécifique permettant d’empêcher la survenue d’un cancer de l’estomac en dehors de l’éradication de l’Helicobacter pylori si la bactérie est présente. Par ailleurs, il est recommandé d’avoir un régime équilibré et varié, riche en fruits et légumes, de lutter contre le surpoids et d’éviter de fumer.

Le reflux est un important facteur de risque de cancer du cardia. Il doit être repéré et neutralisé aussi souvent que nécessaire, d’autant plus que le stress de la vie courante contracte le pylore, ce qui a pour conséquence d’empêcher l’estomac de se vider et favorise les reflux.

L’arrêt du tabac est fortement recommandé car il augmente de façon importante le risque de cancer du cardia.

Il ne faut pas hésiter à consulter son médecin en cas de survenue de symptômes digestifs inhabituels afin de favoriser le dépistage et le traitement de formes précoces de cancer.

Auteurs

Pr Aziz ZAANAN
Professeur des universités-praticien hospitalier en gastroentérologie et oncologie digestive à l’hôpital Européen Georges Pompidou à Paris. Spécialisé dans le traitement des cancers digestifs. Membre du comité scientifique de la fédération francophone de cancérologie digestive (FFCD).
Pr Aziz ZAANAN
Professeur des universités-praticien hospitalier en gastroentérologie et oncologie digestive à l’hôpital Européen Georges Pompidou à Paris. Spécialisé dans le traitement des cancers digestifs. Membre du comité scientifique de la fédération francophone de cancérologie digestive (FFCD).
Dr Emmanuelle Samalin-Scalzi
Praticien spécialiste en oncologie médicale à l'ICM depuis 2006. Spécialisée dans les cancers digestifs. Présidente du groupe UNICANCER pour les cancers digestifs depuis 2018. Impliquée dans la recherche clinique et la coordination d'essais thérapeutiques.
Dr Emmanuelle Samalin-Scalzi
Praticien spécialiste en oncologie médicale à l'ICM depuis 2006. Spécialisée dans les cancers digestifs. Présidente du groupe UNICANCER pour les cancers digestifs depuis 2018. Impliquée dans la recherche clinique et la coordination d'essais thérapeutiques.
Pr Florence Huguet
Professeur des universités-praticien hospitalier d’Oncologie Radiothérapie (Sorbonne Université). Exerce à l’hôpital Tenon (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris). Chef de service d’Oncologie Radiothérapie. Se concentre sur les cancers digestifs et ORL.
Pr Florence Huguet
Professeur des universités-praticien hospitalier d’Oncologie Radiothérapie (Sorbonne Université). Exerce à l’hôpital Tenon (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris). Chef de service d’Oncologie Radiothérapie. Se concentre sur les cancers digestifs et ORL.
Pr Guillaume PIESSEN
Professeur des universités-praticien hospitalier de chirurgie digestive et oncologique (Université de Lille). Spécialisé dans la prise en charge des cancers digestifs, chef du service de chirurgie digestive et générale.
Pr Guillaume PIESSEN
Professeur des universités-praticien hospitalier de chirurgie digestive et oncologique (Université de Lille). Spécialisé dans la prise en charge des cancers digestifs, chef du service de chirurgie digestive et générale.

La recherche : exemples de projets soutenus