La Recherche

Quels sont les nouveaux médicaments contre le cancer du pancréas ?

La chimiothérapie conventionnelle s’attaque à la multiplication anarchique des cellules cancéreuses. Son activité repose sur le fait que les cellules tumorales se multiplient plus vite que les cellules normales et sont plus sensibles aux produits. Cependant, les cellules normales sont exposées à la chimiothérapie, et celles qui se divisent assez vite (cellules du sang, des muqueuses, cheveux…) peuvent être touchées (c’est ce qu’on appelle la toxicité ou « effets secondaires »).

Les nouveaux médicaments contre le cancer visent à s’attaquer aux cellules tumorales en tirant profit de certaines de leurs caractéristiques. Ils doivent idéalement bloquer de façon précise certains systèmes ou « cibles » (récepteurs sur la cellule, enzymes, facteurs de croissance des vaisseaux tumoraux…) favorisant la multiplication des cellules tumorales et qui sont moins actifs (ou n’existent pas) dans les cellules normales de l’organisme.

Ces nouveaux médicaments sont appelés « thérapies ciblées ». Actuellement, un nombre limité a une efficacité prouvée mais ils sont l’objet d’importantes recherches. Leur toxicité est généralement moindre que celle de la chimiothérapie conventionnelle.

Mais il ne faut pas opposer les deux catégories de traitement : dans de nombreux cancers, on associe fréquemment les thérapies « ciblées » avec les chimiothérapies « conventionnelles » pour tirer profit de leurs modes d’action différents et parfois complémentaires.

A ce jour ni les thérapies ciblées, ni l’immunothérapie, n’ont montré d’efficacité chez les patients atteints de cancer du pancréas à 2 exceptions près :

  • dans une forme très rare de cancer du pancréas dite MSI (microsatellites instables) et représentant 1% des cancers du pancréas, l’immunothérapie semble donner des résultats préliminaires intéressants.
  • dans une autre forme très rare de cancer du pancréas dite BRCA2 mutée, un produit appelé olaparib et inhibant une molécule appelée PARP, semble permettre un long contrôle de la maladie après une chimiothérapie initiale à base de platine.

Ces traitements ne sont pas encore disponibles en dehors de la recherche aujourd’hui mais devraient le devenir dans les prochaines années.

Qu’est-ce qu’un essai clinique ?

Un essai clinique est une recherche faite avec la participation de patients pour évaluer scientifiquement la valeur d’un nouveau médicament ou d’une nouvelle association de médicaments. Il permet aux patients de recevoir de nouveaux traitements non encore disponibles en dehors de ces essais cliniques (non commercialisés ou non encore recommandés), et aux médecins de mettre au point les traitements de demain.

Voici, en résumé, la stratégie utilisée pour le développement de nouveaux traitements.

Une fois qu’une molécule prometteuse a été identifiée par un laboratoire de recherche et que les études « pré-cliniques » ont été réalisées (expérimentations réalisées sur des cultures de cellules tumorales dans des tubes au laboratoire et chez l’animal avant l’utilisation de la molécule chez l’homme), les essais thérapeutiques dits de phase I peuvent commencer. Ils s’adressent à des patients volontaires et sélectionnés, pour lesquels les traitements habituels ne sont plus efficaces. Le but de ces essais est de déterminer les doses maximales du nouveau médicament pouvant être tolérées ainsi que ses effets indésirables.

Les études de phase II ont pour but de vérifier que le traitement testé en phase I, et dont la dose non toxique a été déterminée, a une activité probante sur les patients. Cette phase vise à apprécier le taux de réponse tumorale (diminution de taille) et à analyser chez un plus grand nombre de patients les effets secondaires indésirables du médicament à la dose qui a été retenue lors de la phase I.

Les études de phase III sont une étape majeure pour déterminer si le médicament testé sera retenu parmi les traitements futurs et proposé à grande échelle à tous les patients. Quand un traitement actif a été identifié et donne des résultats prometteurs en phase II, il faut le comparer au traitement dit de référence (utilisé habituellement) et voir s’il lui est supérieur. Ce type d’étude, très coûteuse et longue à organiser, exige la participation d’un nombre beaucoup plus grand de patients (parfois plusieurs centaines) et fait l’objet d’une «randomisation», c’est-à-dire d’une sorte de tirage au sort élaboré au cours duquel ni le patient ni le médecin n’ont le choix du traitement (entre le médicament de référence et le nouveau médicament testé). C’est le seul moyen scientifique possible pour réellement comparer 2 traitements et ainsi pouvoir définir un éventuel nouveau « standard » de traitement qui sera proposé de façon universelle.

Si le médecin propose au patient de participer à un essai clinique, celui-ci peut accepter sans trop de crainte car les essais thérapeutiques sont très soigneusement élaborés, en prenant en compte la sécurité du patient avant tout, et font l’objet d’une réglementation très stricte. Ils doivent être approuvés par un comité d’éthique, être déclarés aux autorités françaises et européennes compétentes. Enfin, ils sont soumis à des règles internationales, appelées Bonnes Pratiques Cliniques (BPC).

Le patient doit répondre aux critères exigés par le protocole, en ce qui concerne sa maladie et son état de santé. Ensuite, il reçoit une lettre d’information qui explique en détail la recherche et qu’il doit lire attentivement, avec ses proches le cas échéant ; il peut demander toutes les explications qu’il souhaite avoir puis il doit donner son accord en signant avec son médecin un formulaire de consentement éclairé avant de pouvoir participer à l’essai clinique. Sa participation est donc totalement libre et volontaire.

Auteurs

Pr Julien Taieb
Professeur des universités-praticien hospitalier d’Hépato-Gastro-Entérologie (Université Paris V) ; spécialisé dans la prise en charge des cancers digestifs, chef du service d’oncologie digestive de l’hôpital Européen Georges Pompidou (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris), il exerce en plus de ses fonctions hospitalières une importante activité de recherche clinique et fondamentale.
Pr Julien Taieb
Professeur des universités-praticien hospitalier d’Hépato-Gastro-Entérologie (Université Paris V) ; spécialisé dans la prise en charge des cancers digestifs, chef du service d’oncologie digestive de l’hôpital Européen Georges Pompidou (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris), il exerce en plus de ses fonctions hospitalières une importante activité de recherche clinique et fondamentale.
Pr Lilian Schwarz
Professeur des universités-praticien hospitalier de chirurgie digestive (Université de Rouen) ; il exerce à l’hôpital Charles Nicolle (CHU de Rouen) où il est en charge de la chirurgie hépatobiliaire et pancréatique. Son activité de recherche se concentre sur les cancers digestifs et particulièrement du foie et du pancréas.
Pr Lilian Schwarz
Professeur des universités-praticien hospitalier de chirurgie digestive (Université de Rouen) ; il exerce à l’hôpital Charles Nicolle (CHU de Rouen) où il est en charge de la chirurgie hépatobiliaire et pancréatique. Son activité de recherche se concentre sur les cancers digestifs et particulièrement du foie et du pancréas.
Pr Florence Huguet
Professeur des universités-praticien hospitalier d’Oncologie Radiothérapie (Sorbonne Université) ; elle exerce à l’hôpital Tenon (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris) où elle est chef de service d’Oncologie Radiothérapie. Son activité clinique se concentre sur les cancers digestifs et ORL, domaines dans lesquels son expertise est reconnue sur le plan international.
Pr Florence Huguet
Professeur des universités-praticien hospitalier d’Oncologie Radiothérapie (Sorbonne Université) ; elle exerce à l’hôpital Tenon (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris) où elle est chef de service d’Oncologie Radiothérapie. Son activité clinique se concentre sur les cancers digestifs et ORL, domaines dans lesquels son expertise est reconnue sur le plan international.

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